La situation politique en France et en Italie : différences et similitudes

par Giuseppe Barranco

Je suis tout à fait conscient de l’importance de ce colloque, qui ne manquera pas de susciter des questions, des réponses et des réflexions sur un sujet qui touche à l’avenir de nos pays et de nos économies.
Ma participation au débat est animée par ma conviction profonde que le thème choisi pour cette rencontre, « Vers l’union de la droite », doit représenter le point de départ d’une nouvelle campagne et d’un nouvel élan politique qui permettra à la droite libérale, à la droite des modérés, de renforcer son identité et de consolider sa position, en France comme en Italie. Si d’une part, les Français et les Italiens éprouvent instinctivement de forts sentiments de sympathie et de « compatibilité » réciproques, d’autre part, « le cours de l’histoire »a été souvent révélateur de différences importantes entre nos deux nations.
En 1958, le général de Gaulle (Mémoires de guerre, « Le Renouveau », 1958) écrivait: « La France vient du fond des âges. Elle vit. Les siècles l’appellent. Mais elle demeure elle-même au long du temps. Ses limites peuvent se modifier sans que changent le relief, le climat, les fleuves, les mers, qui la marquent indéfiniment. »
La France vient du fond des âges. Elle vit, donc.
Par conséquent, la politique se doit d’être au service du peuple français, jamais le contraire. Son orgueil national et sa tradition démocratique ont leur poids, ce qui marque déjà une différence par rapport à l’histoire d’Italie. Néanmoins, sur le plan politique, les deux pays se ressemblent sur l’essentiel : les rapports de force entre la droite et la gauche.
En France, comme en Italie, le centre-gauche ne dispose pas d’une majorité capable de gouverner et reste fortement conditionné par le concept de l’État-providence et par le rôle central attribué à l’État, deux notions dont les communistes sont imprégnés. Nous vivons ces jours-ci, en Italie, les conséquences du chantage exercé par le parti communiste contre le centre gauche, un chantage bien programmé, qui arrive au moment où le gouvernement est en passe de réaliser ses objectifs économiques, en vue de l’entrée de l’Italie dans la monnaie unique.
L’Italie, qui a assisté à la formation du parti communiste le plus important d’Europe occidentale, est un pays où, paradoxalement, la doctrine marxiste et léniniste a été directement introduite par la culture soviétique, mais où les communistes eux-mêmes se sont transformés en démocrates-libéraux.
Ce changement rapide a affecté les dogmes idéologiques du parti communiste, qui, en se transformant, a abandonné le noyau dur de ses camarades marxistes minoritaires. Ceux-ci ont pris la dénomination de Rifondazione Comunista, une appellation qui évoque éloquemment la nécessité de refonder le parti communiste pour assurer une suite à la lutte marxiste des travailleurs.

Cette nouvelle donne a fourni aux partis du centre-gauche l’occasion pour créer un rassemblement, dont l’objectif était de neutraliser le succès du « Polo delle libertà » (Pôle des libertés), né en 1993 autour d’un leader commun et battu aux élections de 1996. Cette force de droite représente, néanmoins, un exemple de volonté de créer une majorité capable de gouverner.
Alors qu’en Italie la droite s’est forgé une identité, en France on observe encore une situation caractérisée par deux partis, R.P.R. et U.D.F., qui, bien que disposant, il y a cinq mois seulement, d’une majorité écrasante, aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au gouvernement, ont perdu les dernières élections, ouvrant ainsi la porte à une fatigante cohabitation entre le président de la République et la gauche. Ce qui prouve la nécessité pour la droite française d’intégrer en son sein de nouvelles forces de droite, jusqu’ici exclues du jeu politique.
Deux questions surgissent spontanément :
– Pourquoi n’arrive?t?on pas à fédérer R.P.R. et U.D.F., compte tenu du fait qu’ils semblent partager un électorat commun ?
– Etant donné que les droites sont majoritaires, en termes de suffrages, pourquoi ne pas essayer de surmonter le clivage avec le Front national (15 % des voix) ?
Un choix de ce genre permettrait de former une vaste majorité, susceptible de gouverner avec un programme libéral et de solidarité sociale.
Notre expérience italienne nous a appris que les communistes ou les socialistes au gouvernement sont en mesure de structurer leur pouvoir au sein de toutes les institutions de l’État. Un pouvoir qui survit aux gouvernements et qui perpétue une culture et des pratiques qui nous sont étrangères et qui assurent une opposition efficace, quelle que soit la coalition au pouvoir.
En France, Alain Peyrefitte s’est clairement prononcé contre l’anathème dont le Front national fait l’objet, ainsi que certains responsables du R.P.R et de l’U.D.F., qui manifestent une volonté croissante d’envisager un changement de stratégie.
J’ai appris par Le Figaro qu’Hervé Novelli, délégué général du parti d’Alain Madelin, a plaidé contre la diabolisation du F.N., affirmant : « Nos critiques à l’égard du Front national doivent être faites sur la base de nos idées et non pas à partir de vieilles lunes antifascistes qui viennent de la gauche la plus archaïque… » ; à quoi j’ajoute : attention à ne pas subir l’instrumentalisation de la gauche.
En Italie, on est arrivé à une rupture entre les deux composantes du Movimento Sociale Italiano (M.S.I.), ce qui a donné lieu, en 1994, à la naissance d’Alleanza Nazionale (Alliance nationale).
La gauche en a profité pour essayer de forcer la lecture de ce processus de modernisation, sur le registre suranné du fascisme, mais, malgré l’entrée au Parlement d’un membre de la famille Mussolini, les électeurs ont confié à l’A.N. le rôle de deuxième parti de la droite italienne et la mission d’exercer une forme de vigilance sur l’extrême-droite.
Les résultats des élections de 1994 confirment le succès de cette nouvelle stratégie de la droite : l’A.N. remporte 13,5 % des suffrages et entre dans le gouvernement Berlusconi avec cinq ministres. La même année, les élections européennes de juin attribuent au parti 12,5% des voix. Les électeurs cautionnent ainsi la nouvelle image et la stratégie renouvelée de la droite.
Encore aujourd’hui, après la chute du gouvernement Berlusconi, Alleanza Nazionale ne cesse de jouer un rôle considérable dans le processus de consolidation de la droite.

On ne retrouve pas, dans ce parti, un caractère nationaliste extrême, ni des thèses racistes ou fascistes. Il a plutôt épousé les traits d’une politique libérale, avec quelques critiques à l’égard de certaines conceptions étatistes.
En Italie, comme en France, la question morale qui entoure les partis de la droite historique évoque toujours une période qui, désormais, est devenue histoire et qui s’est épuisée avec la génération qui l’a vécue. Cette question morale, a-t-elle encore un sens ? En Italie, la présence d’A.N. sur la scène politique renforce le rôle des partis du centre contre les nouveaux socialistes, et notamment le P.D.S..

J’ai lu sans surprise, dans la présentation de ce colloque : « … les gouvernements de gauche copient la droite. » Attention, ils peuvent bien la copier, mais ils ne pourront jamais réaliser un programme de droite ! Car, s’ils ont abandonné leurs théories de planification pour rallier la thèse du libéralisme économique et des libertés de religion, ils ne se privent pas pour autant de mettre en œuvre tous leurs moyens, afin de diffuser une culture d’assistanat exaspérée, qui est la négation même des libertés économiques et des valeurs libérales. Cette démarche va à l’encontre d’un développement économique sain, qui seul permet de réaliser le devoir social, dont le contenu est exprimé par le mot de solidarité.
Afin d’éclairer les différences et les similitudes entre nos deux pays, il est utile de rappeler l’évolution de l’histoire politique italienne contemporaine, qui a permis enfin d’envisager la bipolarité comme étant une option possible et nécessaire.
Le parti d’extrême-droite est né des cendres du fascisme, comme l’a déclaré sans ambiguïté le Movimento Sociale Italiano, lors de sa fondation en 1946. Mais, de fascisme « mouvement » il a rapidement évolué vers un fascisme « régime », avec un caractère bourgeois, clérical, modéré et conservateur. Cette évolution s’est poursuivie jusqu’à la situation actuelle, précédemment évoquée.
Depuis la fin de la guerre, l’opposition a mené sans trêve une campagne violente avec toutes les forces contraires aux fascisme. Jusqu’au nouveau cours entrepris par l’A.N., le M.S.I. est resté exclu de ce qu’on appelle l' »Arc constitutionnel » et la gauche a constamment brandi le thème de la guerre partisane, considérée comme un « deuxième Risorgimento » italien.
C’est dans ce contexte que la droite a entrepris son processus de modernisation, qui l’a rapproché du centre, après sa séparation de son noyau dur, représenté par une minorité historiquement liée aux temps passés.
Il a fallu vingt-cinq ans pour que le parti d’extrême droite mûrisse une stratégie de rapprochement avec le centre. Cette période a coïncidé avec l’hégémonie de la démocratie chrétienne et de son adversaire, le parti communiste.

Après la guerre, la D.C. a gagné rapidement la confiance des Italiens, grâce, d’une part, à sa participation aux mouvements de résistance, comme les communistes et les autres forces politiques et, d’autre part, au rôle joué dans la rédaction de la nouvelle Charte constitutionnelle. L’influence de ses hommes dans la phase de reconstruction du pays lui a valu un rapport de confiance avec la société italienne, ce qui lui a permis de prendre le dessus sur les communistes. Par ailleurs, la culture soviétique suivie par le parti communiste italien faisait en sorte que la classe modérée et catholique se reconnaisse dans les hommes et dans les partis qui défendaient les principes de liberté sociale, économique et religieuse, et qui fondaient leurs programmes sur des valeurs telles que la famille et l’éthique. La D.C. représentait à cette époque une vraie majorité.
De Gasperi d’abord, Fanfani ensuite, ont été les véritables leaders italiens de cette période.
Ce climat de confiance a duré jusqu’au référendum de 1974 pour l’abrogation de la loi sur le divorce. Cette date ouvre un clivage dans l’histoire moderne de l’Italie et marque le début de la crise du parti qui s’était identifié à l’État comme le parti de l’administration et de l’économie publiques. Contrairement à l’époque De Gasperi, la période Fanfani sera caractérisée par une forte symbiose entre le parti démocrate-chrétien et l’État. Il faut considérer que la D.C. a eu le mérite d’avoir reconstruit l’Italie, l’Italie des années cinquante, l’Italie où le concubinage était encore poursuivi par la loi, où les droits des enfants illégitimes n’étaient pas reconnus et où l’adultère de la femme était pénalisé. La gauche ne se privera d’ailleurs pas d’utiliser ces arguments pour alimenter sa propagande politique.
Les années soixante-dix marquent un véritable tournant dans la vie politique italienne. Deux événements importants sont à rappeler à ce sujet :
– le résultat électoral du référendum de 1974, par lequel 70% des électeurs se prononcent contre l’abrogation de la loi sur le divorce ;
– le résultat des élections administratives de 1975, au cours desquelles le P.C.I. avance furieusement et la D.C. perd la majorité dans les gouvernements municipaux. Rappelons au passage que le pouvoir détenu par la D.C. au sein des collectivités locales lui permettait de se considérer comme le parti de la classe modérée.
Fanfani doit abandonner le secrétariat du parti, la D.C. ayant perdu quelque 700.000 inscrits.
C’est le véritable début du Centre-Gauche, qui coïncide avec la perte, par les modérés, de leur rôle central.
Pendant ce temps, le laboratoire politique italien ne cesse de rechercher des équilibres : succession de gouvernements « unicolores » d’Andreotti, gouvernements techniques avec tous les partis, à l’exception, de la droite extrême, représentée par le M.S.I., et, bien entendu, du P.C.I..
Après l’hégémonie du parti socialiste de Craxi et la chute du mur de Berlin, la D.C. vit un deuxième moment de défaillance. C’est l’époque des enquêtes de la magistrature, qui révèlent les scénarios de corruption bien connus et qui transforment Milan et une grande partie de l’Italie en « pays des pots de vin ». Tous les partis qui ont gouverné, D.C., P.S.I. et les autres, y sont impliqués, à l’exception du M.S.I.. Les investigations menées par les magistrats prennent le nom d’une opération qui se poursuit encore aujourd’hui : Mani pulite (Mains propres).
La D.C. s’effondre ; une partie de celle-ci s’engage à gauche (P.P.I. ? Bianco), l’autre va vers la droite (C.C.D. ? Casin ; C.D.U. – Buttiglione) ; le P.S.I. disparaît et son leader Craxi, qui a quitté l’Italie pour la Tunisie, est condamné par contumace.

C’est à ce moment qu’Alleanza Nazionale se sépare du M.S.I., et que Berlusconi fonde son propre parti, Forza Italia. C’est à lui et à ses alliés que revient le mérite d’avoir arrêté les communistes aux élections de 1994, grâce également au soutien apporté par le parti qui incarne le mécontentement du nord de l’Italie au début des années quatre-vingt-dix, la Lega Lombarda (Ligue lombarde) de M. Bossi.
1993 a été pour nous, hommes de la grande droite italienne, une année magique, qui a nourri l’espoir de nouveaux scénarios ; une occasion où les modérés italiens, ces citoyens déçus par tant d’années de pouvoir des partis et d’une classe politique inamovible, ont commencé à réagir, à descendre dans la rue. Pendant cette
période, on a assisté à la naissance spontanée d’assemblées formées par des employés, des dirigeants, des ouvriers, des professionnels et des industriels, se réunissant en comités pour choisir et soutenir leurs candidats, en vue des élections administratives (Milan 1993) et politiques (1994).
Depuis, un renouvellement complet de la classe politique italienne a eu lieu, au cours des quatre dernières années.
Je dois avouer que la plus grande partie de l’électorat dit modéré a eu l’illusion que le Polo delle libertà représenterait un rassemblement de droite susceptible d’assurer un gouvernement stable au cours des deux législatures prochaines. Cela aurait été trop simple et facile pour l' »art politique italien »…, si sophistiqué. Car, l’union des droites, réalisée par le Polo delle libertà, est encore trop jeune.
Tout comme au cours des années cinquante, la société italienne d’aujourd’hui aurait besoin d’un parti du centre capable d’assurer la mise en œuvre d’une stratégie, d’un projet solide, susceptible d’attirer vers elle tous les modérés qui se trouvent actuellement à gauche, dans une alliance contre nature.
Le renouvellement de la classe politique intervenu en 1994 a révélé bientôt un aspect imprévu : les procédures bureaucratiques du Parlement et des ministères n’étaient pas bien maîtrisées par les hommes de Forza Italia et d’Alleanza Nazionale, ceux-ci n’ayant jamais exercé le pouvoir auparavant. En revanche, les membres de la gauche, forts d’une organisation datant de la première République et ayant déjà occupé des places de direction dans les institutions, ont été largement favorisés dans leur politique d’obstruction, mettant ainsi en crise, sur le plan procédural, la majorité née des élections de 1994.
Cependant, Forza Italia et ses alliés ont démontré, pendant la courte parenthèse gouvernementale de la droite, qu’ils étaient en mesure de produire une législation à la hauteur de la situation. Encore aujourd’hui, la loi Tremonti est synonyme d’une législation visant à développer les investissements économiques et à soutenir l’emploi.
La chute de Berlusconi et de son gouvernement, avec la campagne électorale qui a suivi, nous a permis de constater que la gauche essaie sans cesse de plagier les programmes de la droite.
Sous l’appellation de « L’Ulivo » (l’Olivier), et sous la direction de Romano Prodi, ancien président de l’I.R.I. (le holding industriel et financier le plus important de l’État), la gauche rassemble les anciens communistes, réunis sous le symbole du chêne, les verts, les catholiques de la gauche et les « broussailles » anciennes et nouvelles du centre-gauche. Entre l’olivier, le chêne et ces « broussailles », la gauche devient une véritable jungle, que redoutent ses membres mêmes, comme l’a prouvé, il y a une semaine, la crise qui a entraîné la chute du premier gouvernement Prodi.

Notre conviction profonde est que l’avenir est dans une grande droite, renforcée au centre. On estime, en Italie, et pas seulement, que les modérés représentent une large majorité, ce qui est confirmé par deux autres évidences :
– la D.C. a été, dans le passé, le parti des modérés et des catholiques ;
– en France, la situation politique actuelle révèle la présence de deux partis, R.P.R. et U.D.F., qui représentent une majorité relative. Avec le Front national, celle?ci pourrait devenir une majorité absolue.
N’oublions pas que la gauche est minoritaire, qu’il existe à droite des cultures homogènes et que cette homogénéité, nous nous devons de la préserver contre toute attaque provenant de la gauche.
Je fais allusion ici, une fois de plus, à toute la droite, du centre à l’extrême droite, comme l’a définie Jean Pierre Soisson, député de l’Yonne.
Les électeurs modérés, à qui appartient notre avenir, demandent ordre, clarté sociale, une fiscalité équitable, des contrôles sévères sur les dépenses publiques ; en d’autres termes, ils veulent une gestion intelligente de la Res Publica.
A l’horizon 2000, la question de l’immigration se pose avec urgence dans nos pays. Elle demande à être résolue. Face à ce défi, qui concerne toute la région européenne dans son ensemble, nous devons être préparés et unis, aussi bien du point de vue économique que social. Nous estimons à ce propos que seule la réponse libérale est en mesure d’apporter une solution équitable à ce problème.
L’opposition exercée par la droite doit se consolider, car le clivage entre la droite et la gauche existe et existera pendant longtemps. Rassembler la droite par le centre devient donc impératif. L’extrême droite aussi doit comprendre combien il est important de sortir de son isolement et d’évoluer vers une alliance forte pour le bien de la société libérale. Bien qu’elles aient perdu une bonne partie des contenus qui les caractérisaient, et malgré l’affaiblissement de leur conflit idéologique de fond, la droite et la gauche ne gardent pas moins des différences notables, et le clivage est toujours présent entre ces deux cultures.
Pour définir la situation actuelle, nous utiliserons les mots d’Indro Montanelli, qui affirme : « Aujourd’hui, le socialisme le plus éclairé s’est aperçu qu’il ne peut plus se passer d’un fort développement capitaliste, tout comme le capitalisme le plus conscient a reconnu qu’il lui est impossible de se passer de correctifs socialistes. Nous, les Italiens, nous sommes en train d’y arriver, avec un peu de retard, mais nous allons y arriver. »
C’est là une représentation de l’esprit modéré italien, qui pourrait sonner comme un défi à la culture libérale traditionnelle.
On s’interroge, ces jours-ci, sur l’évolution que doit avoir le « Polo » pour mieux travailler à la formation du grand centre-droit. Avec la nécessité de trouver des idées et d’établir un contact permanent avec les forces sociales, on considère aussi la possibilité de préconiser une formule de centre-droit, sur le modèle français… Une formule fondée sur l’alliance entre la droite démocratique gaulliste et la droite giscardienne et libérale, susceptible de réunir les catholiques, les laïques et les réformistes.

En Italie, cela pourrait prendre la configuration suivante : un « pilier » représenté par Alleanza Nazionale, qui aurait accompli son évolution au sens moderne et libéral, et un autre pilier constitué par une fédération du centre. Mais, pour le développement de ce projet, nous devons pouvoir compter sur une classe dirigeante efficace. D’où l’importance d’une sélection attentive des personnes, fondée sur l’exemple de 1993.
Les élections municipales à Milan témoignent du bien-fondé de cette démarche pour la droite. Les Milanais ont choisi pour maire un entrepreneur, Gabriele Albertini, vice-président de la section lombarde de Confindustria, président de la Fédération des industries mécaniques ; un homme qui, jusque-là, ne s’était jamais occupé de politique, mais que les comités de la ville ont choisi comme leur candidat. Quatre mois après l’élection de sa municipalité de droite, les premiers signes d’une reprise économique et culturelle n’ont pas tardé à se faire sentir.

Je conclurai mon discours en vous proposant la définition de la démocratie et du socialisme qu’a donnée Alexis de Tocqueville, dans une libre traduction du texte italien, qui renforce l’idée selon laquelle le fossé entre le socialisme et la démocratie est loin d’être comblé :
« La démocratie et le socialisme ne sont pas solidaires l’une de l’autre. Ce sont deux choses non seulement différentes, mais opposées…
« La démocratie étend la sphère de l’indépendance individuelle ; le socialisme la restreint.
« La démocratie attribue la plus grande valeur à chaque homme ; le socialisme fait de tout homme un agent, un instrument, un numéro.
« La démocratie et le socialisme ne se rapprochent que par un mot : égalité ; mais remarquez la différence : la démocratie plaide pour l’égalité dans la liberté, alors que le socialisme plaide pour l’égalité dans le besoin et dans la servitude. »