Philosophie des « Lumières » et idéologies de gauche

par Yves Durand

Il aurait été plus facile de faire cet exposé sur les rapports entre la philosophie des « Lumières » et les idéologies de gauche en 1950 ou en 1970, voire en 1981. Il est évident qu’à ces trois dates, et surtout en 1950 ou 1970, nous avions affaire à un marxisme cohérent, donc à une idéologie facile à cerner, dans la période de la Guerre froide. Aujourd’hui, le marxisme est pratiquement mort, malgré des soubresauts. Nous sommes dans une Europe de Maëstricht ou de Schengen, avec l’euro qui se profile. Nous ne sommes plus dans les « trente glorieuses », mais nous connaissons un chômage structurel permanent et les situations sont beaucoup plus difficiles à analyser.
Qu’est-ce-que la gauche, au fond, aujourd’hui ? Je verrai d’abord la philosophie politique de la gauche actuelle, et non le marxisme de 1950. J’essaierai ensuite de voir l’unité de la pensée des Lumières et puis, naturellement, je tenterai de mettre les deux choses en rapport. J’ai été éclairé par une phrase qui m’a frappé, à laquelle vous pouvez tous adhérer : « Faut-il rappeler que tout combat politique est en dernier ressort un combat moral et éthique au nom de valeurs et d’une certaine manière de vivre ensemble ? Oui, le vrai, le bien et le juste existent. » M. Daoudal aurait pu dire cette phrase, il l’aurait trouvée dans Saint Thomas, dans le concile de Trente et dans des textes religieux, catholiques ou protestants. Or, elle vient du rapport d’orientation du Parti socialiste « pour un combat efficace contre le Front national », du mois de mars 1997. Il faut donc se méfier, il y a des souterrains entre Saint Thomas et le Parti socialiste auxquels je ne pensais pas en commençant ce travail. J’adhère entièrement, ce qui prouve mon degré d’ouverture politique, à cette idée que derrière un combat politique, il y a des valeurs et que le vrai, le bien et le juste (il manque le beau) existent en soi.

J’ai eu une deuxième difficulté. Comme le docteur Jean-Louis Garello et Alain Griotteray, je ne suis pas très capable de faire une grande différence entre la droite parlementaire et la gauche actuelle, en ce qui concerne le système des valeurs. Je parle des socialistes, en laissant de côté les communistes, qui sont une force d’appoint. Si je prends des déclarations de ministres illustres, comme Philippe Douste-Blazy ou Jacques Toubon, et que je les mets en parallèle avec celles de Jack Lang ou du ministre actuel de la Culture, je pourrais faire bien des citations dont vous seriez incapables de trouver l’auteur. Le « politiquement correct » a tout envahi. Voici encore une phrase : « Une chose est certaine, le mot sélection est un mot sur lequel on ne reviendra plus en France. Il est contraire à nos systèmes de pensée. » La sélection existe dans l’ordre naturel : les entreprises font faillite ; je ne peux pas courir le marathon de New-York, etc.. Je peux jouer aux courses et là, les chevaux sont bien sélectionnés. Mais le mot sélection est obscène. Vous direz que c’est d’un député socialiste de base. Eh bien non, cela vient d’un obscur secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur, qui a déjà plongé dans le gouffre de l’oubli politique, Jean de Boishue, U.D.F., dans une interview au Figaro du mois de juillet 1995. La sélection existe dans l’enseignement supérieur. On n’a pas supprimé Polytechnique, Centrale, les Mines, les I.U.T., les classes préparatoires, etc.. Cette déclaration est idiote, au point de vue éthique, au point de vue biologique, à tous les points de vue, même au point de vue administratif, puisque c’est contraire à la réalité : la sélection existe.
Deuxième citation. Dans tous les domaines, la diversité est la base de la réussite. En France, on a confondu la notion d’égalité et l’égalitarisme. L’égalité, c’est la diversité, c’est-à-dire donner à chacun l’occasion de s’épanouir dans le domaine où il est bon. Or, les problèmes ne sont pas les mêmes dans les différentes disciplines, et l’on veut instaurer les mêmes règles et les mêmes programmes pour tout le monde. Ce besoin de normes uniques est la faiblesse de notre pays. C’est la manie française de l’égalitarisme. Ce sera très difficile de changer cela. Par contre, aux États-Unis, c’est la diversité. Les critères de sélection des étudiants sont totalement différents d’une université à l’autre. « L’élitisme républicain impose une sélection par des critères réputés les plus objectifs possible. » Vous me direz : ce ne peut être que Chevènement qui parle d’élitisme républicain. Mais, en réalité, cela vient de Claude Allègre, dans une interview au Figaro qu’il a donnée en 1995. C’est un texte élitiste. Autrement dit, nous ne devons pas nous borner aux déclarations des hommes politiques, qui sont éminemment ambiguës.
Pour voir la transmutation d’une idéologie dans les faits, le mieux est d’étudier la loi de finances. Or, j’y ai retrouvé en 1997 cinq thèmes caractéristiques de la philosophie politique du P.S.. Ce sont l’égalitarisme, l’étatisme, le laïcisme, l’humanitarisme et l’écologisme. Ce sont pour moi des dépravations, des perversions de choses normales. Je mets cela en « isme », parce que l’écologie est une bonne chose, l’humanitaire aussi, la laïcité, un catholique pourrait très bien l’admettre, l’Etat est une nécessité et l’égalité civile est une bonne chose également.
Dans les déclarations à la convention nationale du P.S. de décembre 1996, je trouve les principes de l’égalitarisme : le capital, dont la logique pèse de tout son poids en faveur de la régression sociale ; le libéralisme économique, qui sacrifie l’individu au profit et la cohésion sociale au marché ; il faut assurer l’égalité des chances par l’éducation et la culture. Je me suis dit que c’étaient bien des déclarations socialistes, mais que le mot égalité des chances avait été utilisé la première fois par Valéry Giscard d’Estaing : à l’époque giscardienne, il y a eu une osmose entre la philosophie politique de la gauche et celle de la droite. Le titre d’un chapitre des actes de cette convention est très important : Reconstruire l’égalité. Comment y parvenir ? Par les services publics, la réforme de la C.S.G., la suppression d’avantages fiscaux accordés aux familles… Les milieux anti-nazis ont beaucoup diffusé Mein Kampf avant-guerre, partant du principe qu’il fallait le lire, parce que tout y était écrit. De même, il faut lire les textes de cette convention, parce que l’on y trouve tout ce qu’ils font à l’heure actuelle. Ils affirment que l’impôt est le moyen de promouvoir l’égalité, et que l’épargne est immorale. Il faut rééquilibrer la part de la fiscalité directe par rapport à la fiscalité indirecte, rééquilibrer l’imposition du travail et du capital, renforcer la progressivité de l’imposition des revenus et des patrimoines.

Les socialistes se prononcent aussi pour la « discrimination positive », qui exprime une idée simple : abandonner l’égalité « formelle » pour l’égalité « réelle », donc donner plus à ceux qui ont le moins, agir en faveur de groupes ou de catégories de populations défavorisées ou souffrant de certains retards, etc., c’est-à-dire que l’on va couper ce qui dépasse, tirer ce qui n’est pas assez grand, de façon à obtenir l’égalité. On agira, premièrement, par la fiscalité ; deuxièmement, par l’éducation tout au long de la vie ; il faut une formation continue, avec des zones prioritaires, etc..
Deuxième point, l’étatisme, avec le recrutement des fonctionnaires. C’est le tout-Etat qui apparaît dans le rapport d’orientation du P.S. « pour un combat efficace contre le F.N. ». Leur étatisme est quand même curieux, parce qu’ils défendent l’idée d’une fédération européenne, dont l’unité de base serait l’Etat-nation. Je me demande s’ils ne confondent pas fédération et confédération, ce qui n’a rien à voir. Une confédération est quelque chose de très libre où les Etats-nations peuvent parfaitement dialoguer entre eux en gardant leur spécificité, mais la fédération implique la création d’un Etat central, et aboutit à la guerre de Sécession.
Troisième point, la laïcité. Dans un texte adopté par la convention nationale du P.S., c’est la valeur de référence, valeur républicaine s’il en est : « Notre ambition est de faire de la culture et de l’éducation le cœur du modèle d’intégration républicaine et laïque. » Autrement dit, il faut que les intégristes musulmans perdent leur islam ; on aura alors un immense ensemble où tous les frères pourront s’embrasser. La laïcité est une valeur positive, indispensable et incontournable, création et condition de la liberté de conscience, fondement du pacte républicain, permettant, avec la séparation de la religion et de l’Etat, toutes les philosophies. C’est du combisme.
Point suivant : l’humanitarisme. C’est la magie incantatoire des droits de l’homme. Les gens ne lisent pas la déclaration de 1789, bien qu’elle soit affichée dans les commissariats de police. Elle dit cependant que la propriété est un droit inviolable et sacré. Elle dit aussi que tous les Français doivent être imposés au prorata de leur revenu. Or, la moitié des Français ne paient pas d’impôt sur le revenu.
Cette magie des droits de l’homme, c’est ce que j’appelle la philosophie de l’U.N.E.S.C.O., qui est la base de l’égalitarisme, selon laquelle toutes les civilisations se valent. Quand on met la Vénus de Milo sur le même plan qu’une statue de Nouvelle-Guinée, cela ne correspond pas à la définition du beau que donnaient les socialistes dans le texte que je vous ai cité, auquel j’adhère pleinement. Voltaire et ses amis ont utilisé les civilisations extra-européennes, qu’ils méprisaient, pour ruiner le christianisme européen en montrant que les Hindous ou les Arabes avaient d’aussi belles choses que nous. Il n’en va pas autrement aujourd’hui.
Dans le rapport contre le Front national, les socialistes affirment leur hostilité à ce qu’ils appellent l’ethnocentrisme. Ils affirment que l’identité de la France n’est pas figée une fois pour toute. Elle se modifie par le creuset républicain, qui s’enrichit sans cesse de nouveaux apports, sous-entendu par la laïcité, puisqu’ils vont éradiquer les racines religieuses de tous ces gens.
Dernier point, l’écologisme. La vraie écologie a été conçue par la droite, et elle se l’est fait voler. Dans les textes socialistes que je me suis infligés, les autoroutes, les T.G.V., le nucléaire, les canaux à grand gabarit, le diesel polluant, etc., sont dénoncés hargneusement. C’est-à-dire que l’on imagine le retour à un âge mythique, dans lequel toutes ces choses auraient disparu.

Je me suis demandé ce que les socialistes avaient pu tirer de la philosophie des Lumières. Dans Qu’est-ce que les Lumières ? de Kant, il y a un beau passage que l’on donne toujours en explication de texte : les Lumières, pour Kant, c’est l’exercice de la raison. Dans les cours de Sorbonne d’Alphonse Dupront qui ont été rassemblés dans la collection Folio sous le même titre que Kant, il est dit que notre vocabulaire politique, la plupart de nos valeurs et de nos images collectives viennent des Lumières. D’autre part, deux principes s’affrontent à l’époque, la liberté et l’égalité. Dupront voit également une grande diversité dans le mouvement des Lumières, puisque l’on y trouve aussi bien un rationalisme athée extrême que des tendances tout à fait irrationnelles, par exemple dans la franc-maçonnerie spiritualiste, florissante à la veille de la Révolution. Les Lumières, c’est aussi bien l’ésotérisme mystique de Mesmer que le spiritualisme de Rousseau, le déisme de Voltaire que l’athéisme de Diderot et d’Alembert.
Certains représentants des Lumières sont des cosmopolites. Comme les européistes d’aujourd’hui, Voltaire et ses amis veulent dissoudre la culture française dans une culture européenne. D’autres sont de purs nationalistes, dans la lignée de Rousseau, qui est patriote genevois, et ce courant va engendrer une partie de la Révolution française, jusqu’à Bonaparte, qui a été rousseauiste.
Il y a un abîme entre la sensibilité de Rousseau et celle de Diderot. Pour Voltaire, le luxe est une nécessité qui engendre le bien. La prostituée va prendre l’argent des gens qui en ont pour se payer des bijoux et des robes. Elle entretient le commerce. C’est la thèse de Mandeville sur les vices nécessaires à la société. Mais Rousseau, qui est austère, vomit le luxe. Sur le plan religieux, Diderot, Helvétius et d’Holbach sont des athéistes et croient à la relativité de la morale. Rousseau et ses amis, au contraire, s’ils sont détachés de la religion protestante ou catholique, défendent la vie spirituelle.
Chez les hommes des Lumières, il y a bien des différences entre les économistes, c’est-à-dire le groupe des libéraux, le groupe des patriotes, qui se placent surtout sur le plan politique, et puis les encyclopédistes, qui se placent sur le plan philosophique. Certains ont eu la chance de mourir avant la Révolution française. C’est le cas de Diderot, Voltaire et Rousseau. Mais Marmontel, qui est le porte-parole du parti philosophique avant 1789, a été obligé de se cacher en Normandie, sinon il serait passé sur l’échafaud. La Harpe, que l’on appelait le premier lieutenant de Voltaire, et qui était athée, se convertit en prison, où il traduisit les psaumes, devenant un adversaire des idées révolutionnaires. Chénier, qui fait dans ses poèmes une espèce de synthèse du XVIIIe siècle philosophique, meurt sur l’échafaud révolutionnaire.
L’idée de Clemenceau que la Révolution est un bloc est fausse historiquement. Ni la philosophie des Lumières ni la Révolution ne sont un bloc. Le scepticisme de Voltaire se retrouve chez les girondins. Rousseau est le père spirituel de Robespierre et de Bonaparte. Diderot, celui de Danton. Robespierre est farouchement hostile, parce qu’il est rousseauiste, à l’athéisme de Condorcet, qui va se suicider en prison. Et il envoie Hébert et Danton à l’échafaud.

Si l’on veut trouver une unité quelconque à la philosophie des Lumières, c’est l’Encyclopédie. On y trouve l’idée du progrès indéfini, qui va nécessairement vers le bien. On n’envisage pas Hiroshima. La première page de l’Encyclopédie est une gravure représentant le triomphe de la Vérité dévoilée par la Raison. C’est le bulletin de victoire des encyclopédistes. On voit la foule admirative des philosophes et des artistes qui lèvent leur visage vers les sciences et les arts, la Raison étant couronnée par la Vérité, et puis la Religion qui est toute petite à côté.

Cela me permet de passer naturellement à ma dernière partie, sous forme de conclusion. C’est la réponse à Alphonse Dupront, affirmant que la philosophie des Lumières n’avait pas exercé de pouvoir. Beaucoup de représentants des milieux gouvernementaux ont adopté les thèses qui devaient les conduire à l’échafaud. C’est de toutes les époques. Choiseul, Premier ministre de Louis XV, est l’homme des Lumières et il prône des principes philosophiques qui vont à l’encontre de sa politique. De même pour d’Argenson, et pour Madame de Pompadour, qui est le triomphe de la finance dans le lit du roi. Elle est dans un tableau célèbre de La Tour, où elle s’appuie sur les tomes de l’Encyclopédie. Et, quand elle est morte, Voltaire a dit : « Nous perdons l’un des nôtres ». Pas « l’une » des nôtres, parce qu’il la considérait comme un philosophe. Turgot, qui est la quintessence de l’hostilité à l’Eglise, a été choisi par Louis XVI, qui était le roi le plus chrétien que l’on ait eu pendant deux siècles. Malesherbes est le directeur de la librairie, c’est-à-dire le chef des censeurs. Il est le gendre du chancelier Lamoignon. Quand l’Encyclopédie commence à sortir, la Sorbonne, et puis le lieutenant-général de police, disent que c’est un monument dirigé contre la religion et le roi, et qu’il faut l’interdire. Malesherbes met les plombs de l’Encyclopédie dans les caves de l’hôtel de son beau-père, rue Pavée. Quand la diffusion reprend, Malesherbes dit aux auteurs jusqu’où ils peuvent aller. Il va diriger l’Encyclopédie, en quelque sorte. Ensuite, il sera chancelier. Naturellement, il se rachètera et sera le défenseur de Louis XVI, avant de passer sur l’échafaud. On peut dire que toute la classe politique, toutes les élites sociales, ont été pénétrées par la philosophie des Lumières, sans se rendre compte qu’elles détruisaient non seulement la religion, mais aussi la branche sur laquelle elles étaient assises, c’est-à-dire leur sécurité économique, leurs avantages et leurs privilèges. Je ne dis pas que je défends ces privilèges, mais encore faut-il être cohérent. Quand on a une philosophie qui va à l’encontre de ses privilèges, c’est que l’on cherche à se suicider.
La société a été atteinte aussi par une arme bien différente. L’Emile, le Contrat social de Jean-Jacques Rousseau, les écrits de d’Alembert et de Diderot ont été beaucoup moins importants que la pornographie, que les livres du deuxième rayon. Il y a, à cette époque, une floraison de livres érotico-politiques, qui font passer un message politique à leur manière. Des montagnes de libelles pornographiques viennent de Hollande et de Suisse. La pornographie ruine la religion, et elle véhicule des idées d’égalitarisme et d’humanitarisme. Le bourgeois ordinaire, l’artisan ne lisent pas des textes politiques très compliqués. Par contre, ils se jettent sur les livres pornographiques à quelques sous que le colporteur leur propose. Et puis, on commence à exploiter de grands scandales pour ruiner le crédit de la classe politique. C’est alors qu’est apparue l’opinion publique, qui n’existait pas auparavant, à proprement parler.
Un professeur de l’université hébraïque de Jérusalem, Talmon, a établi, dans De la Démocratie totalitaire, que la pensée du XVIIIe siècle avait engendré deux courants contradictoires. Elle est à la fois à la source de la démocratie libérale et de ce qu’il appelle la démocratie totalitaire. Jean-Jacques Rousseau, qui est le père de la démocratie totalitaire, a suscité la même tendance paranoïaque chez trois personnages de tempérament messianique totalitaire, Robespierre, Saint-Just et Babeuf. Au XXe siècle, la démocratie totalitaire a eu d’autres représentants.
Je ne mets pas les socialistes actuels sur le plan de Robespierre, de Saint-Just et de Babeuf, que je n’aime pas particulièrement, mais qui sont de grands personnages. Je ne les mets pas non plus sur le plan des grands totalitaires du XXe siècle. Mais ils sont les héritiers de ce que Talmon appelle la tendance paranoïaque des personnages de tempérament messianique totalitaire. Pour eux, la république doit être formée d’individus parfaitement égaux les uns aux autres, parce que rien ne doit s’interposer entre l’homme et l’Etat, et surtout pas les corps intermédiaires. La vision jacobine, selon Talmon, est celle d’une société d’hommes égaux rééduqués par l’Etat, conformément à un modèle exclusif et universel. Cela mène au totalitarisme, qui peut avoir d’autres visages que Hitler ou Staline, et des méthodes plus insidieuses que les leurs. Si je suis Talmon, il est évident que les socialistes sont héritiers, non pas en général de la philosophie des Lumières, qui est multiple, mais de cette partie de la philosophie des Lumières qu’il appelle la tendance paranoïaque, et qui afflige des personnages de tempérament messianique totalitaire.